Ah, Camara Laye
et "L'Enfant noir", ce classique de la littérature jeunesse du milieu du XXe siècle, paru en 1953, dont on découvrait avec ravissement des extraits ou "bonnes pages" dans les manuels de lecture en usage aux débuts de la Ve République ! Je croyais cet écrivain guinéen (1928-1980) disparu de notre panthéon littéraire contemporain, surtout depuis que la transposition moderne et libre de son oeuvre au cinéma, par Laurent Chevallier, en 1995, avait insuffisamment convaincu les spectateurs... Quelle ne fut pas ma surprise de découvrir que Camara Laye était toujours connu de l'Education nationale, par un questionnaire proposé en classe de français de troisième du XXIe siècle, questionnaire dont voici les réponses.
Questionnaire Camara Laye l’Enfant noir.
1/ L’âge du narrateur : il
l’évalue à 5-6 ans. Incertitude de la mémoire : phrase interrogative,
« je devais être » et non pas l’affirmation « j’étais » … Emploi
exclusif de l’imparfait narratif et accessoirement du présent de l’indicatif
mais négatif (« Je ne me rappelle pas exactement »).
2/Le jeu avec le serpent :
l’enfant utilise un roseau, qu’il a ramassé dans la cour (abondance des roseaux
utilisés comme matériau de la palissade tressée) et l’enfonce dans la gueule du
reptile. Le serpent avale progressivement le roseau comme une proie.
3/L’enfant est inconscient du
danger. Ce danger est mortel. Une fois le roseau absorbé, le serpent approche
sa gueule des doigts de l’enfant au risque que ses crochets le mordent (venin).
« Je riais, je n’avais pas peur du tout. » « Il vint un moment
(…) où la gueule du serpent se trouva terriblement
proche de mes doigts ».
4/C’est Damany, apprenti du père,
qui constate le danger et avertit le père, puis soulève l’enfant. Réactions de
la mère : elle crie fort et administre des claques à l’enfant. Plus tard, elle lui fait la leçon :
avertissement de ne plus jamais recommencer un tel jeu.
(coupure dans le texte :
(…))
5/L’enfant a retenu la leçon et
pris conscience que les serpents sont des prédateurs dangereux. Certes, il a
promis de ne plus recommencer, mais son attitude est ambigüe car Camara Laye
précise : « bien que le danger de mon jeu ne m’apparut pas
clairement ». Cependant, il a acquis un réflexe d’alerte face au
danger : chaque fois qu’il aperçoit un serpent, il accourt prévenir sa
mère. Celle-ci tue le serpent à coups de bâton, en s’acharnant sur lui. De
fait, Camara Laye nous informe de deux choses : primo, il y a plusieurs
sortes de serpents et ils diffèrent fort entre eux (prise de conscience de la
diversité des espèces animales). Secundo : la manière dont les femmes
tuent les serpents diffèrent de celle des hommes : elles les réduisent en
bouillie à coups acharnés de bâton alors que les hommes les tuent d’un seul
coup sec assené avec précision. Peut-être que le serpent souffre moins avec la
seconde manière de le tuer.
6/Photo du film
l’Enfant-lion : c’est une relation d’amitié, pas d’hostilité, ni
d’inconscience. L’enfant a un geste d’affection envers le lion (si c’est un
mâle, il est jeune car sa crinière n’a pas encore poussé) puisqu’il pose sa
main gauche sur la nuque ou le cou du félin qui ouvre sa gueule pour exprimer,
je suppose, son bien-être ou son bonheur. Sorte de caresse.
Grammaire :
7/ Imparfait de l’indicatif sur
le mode interrogatif. Présent de l’indicatif avec la phrase négative « ne
(…) pas ».
8/Capteur, capture, captation,
captif (noms). Captiver, capturer (verbes). Captivant (adjectif).
9/Le serpent ne s’esquivait pas.
Ou le serpent ne se soustrayait pas.
10/Figure de style avec
« comme » : la comparaison. Quand le terme comparatif n’est pas
utilisé, nous avons une métaphore.
11/Je me souviens d’un épisode
marquant de mon enfance sans toutefois pouvoir le dater avec précision. L’ancienneté
de l’événement favorise sa déformation, son embellissement. Je le vois
encore : je jouais à proximité de la case de mon papa. Avais-je alors cinq
ou six ans ? Ma seule certitude : j’étais très jeune.