dimanche 10 juillet 2011

Le Trottin, par Aurore-Marie de Saint-Aubain : chapitre 5


Avertissement : ce roman est déconseillé aux mineurs de moins de seize ans.
Chapitre V
Lorsqu’elle eut franchi le seuil de la bibliothèque d’Elémir, tendue de lourds tapis de Perse, Cléore comprit qu’elle venait de pénétrer dans le sanctuaire de la Sacrée Décadence. Elle resta quiète et coite, comme frappée de mutité, d’amuïssement. Seule la mobilité de ses magnifiques prunelles vaironnes trahissait son étonnement au spectacle fantasmatique du nonpareil lieu. Ce fut pour elle une épiphanie, une révélation divine. Elle fut à jamais convertie à la philosophie du marquis, idéologue, Destutt de Tracy d’un monde nouveau en gésine qui lors, devait surgir, tout renverser sur son passage, sens dessus-dessous.
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Sanctuaire était le mot adéquat que babillaient ses lèvres purpurines. Elle, la fille adventice, étrangère, avait l’impression de commettre un sacrilège, de violer cet espace consacré au culte de la nouvelle Kali. Une fois la porte passée, Cléore eut le pressentiment, certes symbolique, qu’elle ne pourrait plus reculer, que s’en aller serait se déjuger. Elle en eut le cœur gros. Emue, elle ne parvint pas à réprimer un tremblement des mains. Son épiderme diaphane de rousse souffrit de diaphorèse. Des gouttes de sueur perlaient sur son cou, sur le duvet érubescent de sa nuque de cygne. Mais la présence d’Elémir la rassurait et bientôt, en son organe cardiaque, dont les battements ralentirent, l’émotion de celle qui pensait se damner retomba. La détumescence du viscère où siégeaient les passions succéda au gonflement. Le sort en était jeté ; elle serait la maudite, celle qui engendrerait l’opprobre autour d’elle.
Elle acheva de retirer ses gants, dénoua le foulard de son chapeau qui retenait ses boucles, les secoua, comme si elle s’ébrouait. Ses yeux d’aigue-marine et d’ambre automnal se satisfirent du spectacle, quoiqu’ils se dévergondassent à l’examen des polissonneries de grand art qui pullulaient en cet outre-lieu satanique. Cléore gaverait son estomac fragile de couleuvres et d’ivraie ; elle absorberait l’ergot du diable ; elle humecterait sa bouche fruitée et vermeille de la lie épaisse du calice, de la cigüe vomique, du sang corrompu, épais, noir, de ce Graal de malheur.
Elle vit tout, observa tout, toucha à tout, se délecta de tout, questionnant son ami, se surprenant à tolérer, puis à approuver, la présence de tous ces bibelots, objets, ouvrages et œuvres plastiques de ces modernes Sodome et Gomorrhe dont Elémir était le gardien, le Grand-Prêtre. Ses petits doigts minces frémissaient d’aise au toucher excitant des pièces étranges de ce musée-bibliothèque. Cléore s’émouvait à la transgression de tous les interdits, effectuée avec une allégresse croissante, à la satanisation progressive de son âme au fur et à mesure qu’elle avançait dans sa visite, dégustant comme à Cythère ou Sybaris l’aménité du lieu.
Lorsqu’elle demandait : « Cette statuette, où l’avez-vous achetée ? » ou encore : « Ce livre, combien vous coûta-t-il ? », sa voix de précieuse, de Lady, acquérait des inflexions tour à tour langoureuses et câlines. Elémir commentait l’historique et la provenance géographique de chaque babiole précieuse par des gestes éloquents de ses mains pommadées, enduites de quelque onguent mystérieux du genre populéum. En muscadin attardé – car il usait du même parfum qu’eux – il répondait ; ne se contentant pas, comme les incoyables, d’omettre toute prononciation du r, il se mit par caprice à amuïr aussi le s du fait qu’il exécrait le peuple, la multitude, le communard, le rouge en général et toute revendication de la Sociale qu’il prononçait ‘ociale, usant d’une aphérèse tranchante comme un couperet. A chaque commentaire osé, les joues de lait rosé de Cléore rougissaient ; des auréoles pourprines les animaient, trahissaient sa honte ambiguë en même temps que son excitation à la découverte de territoires inconnus. Tout en se déniaisant, elle traçait en son cerveau une nouvelle carte du monde, imago mundi, Weltanschauung, terra incognita faite de senteurs exotiques, enivrantes, de poisseuses blettissures de débauche, de saveurs poivrées et torrides, d’us et coutumes qui nous eussent parus barbares et obscènes alors que dans ces contrées soi-disant arriérées, ils paraissaient des plus naturels. Elémir représentait l’ultime épigone d’un rousseauisme perverti, qui regrettait ce temps de l’innocence antédiluvienne où toute chose était possible, où les Tables de la Loi n’avaient pas encore entravé l’instinct. Cléore constata en Elémir un ophiolâtre. Il aimait le Serpent, le Mal, car ce Mal incarnait la Connaissance. Yahvé s’était trompé et le Serpent, symbole du Porteur de Lumière avait raison. D’un vivarium, sis au début de la pièce, persifflaient les langues bifides de ces froides bêtes, de ces pythons molures et autres boas constrictors aux écailles multicolores, aux motifs épidermiques complexes et harmonieux. Ces ophidiens visqueux aux escarboucles fendues firent horreur à Cléore qui n’aimait que les chats. Mademoiselle remarqua que l’adoration du marquis pour cette faune allait jusqu’à un tatouage discret, transparaissant sur la nuque quoique recouvert partiellement par le col de soie de la robe mandarinale. Elle identifia l’amphisbène, cette créature fabuleuse à deux têtes.
Le mitan de la bibliothèque était tout entier occupé par une volière deçà-delà plantée de cerisiers du Japon, lors en fleurs. C’était un spectacle merveilleux de voir voler de branche en branche aras rouges, bleus ou verts, inséparables, mainates, perruches, rosalbins, jacquots du Gabon, cacatoès, colibris, serins, toucans, calaos, pinsons au gros bec et paradisiers. Cette cage d’onyx et de fer forgé au compliqué tarabiscot s’emplissait des jacassements des oiseaux tropicaux aux plumages agrestes, des sifflements et paroles des papegais multicolores, jouant aux pipelets avec faconde, imitant qui la locomotive en marche, qui le vagabond aviné, qui encore la concierge bavarde… Au-dessus de la volière, une coupole rappelait l’architecture dominante de la demeure. Elle s’ouvrait, tel un impluvium ou plutôt, comme ses semblables des observatoires. A cette volière, afin que les volatiles ne se sentissent point dépaysés, Elémir avait annexé une serre tropicale où croissaient seringas, palétuviers, fougères arborescentes, arums, bambous sacrés, bougainvillées et pulicaires. Un sas permettait aux oiseaux de passer d’un lieu à l’autre, de se bâfrer des graines, de boire aux ruisselets d’eau vive sans cesse alimentés par un jeu subtil de pompes et de saouler leurs becs orangés des pulpes des goyaves et fruits de la passion.
Cléore parcourut les rayonnages de la bibliothèque. De ses petites dents étincelantes, qu’on eût pu croire encore de lait, émergeait le murmure de leurs titres. La surprise fut grande : les ouvrages de dévotion intransigeante du siècle janséniste se mélangeaient avec cette fameuse littérature obscène débordant des librairies du Directoire. Le c… de la soubrette cohabitait en toute quiétude avec L’Augustinus et le Mars Gallicus de Jansénius,
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Le v… du Pape ou la nonne troussée avec De la fréquente communion d’Antoine Arnauld, sans omettre les inconvenants et anglophones Memoirs of shabby pantaloons, by an anonymous aristocratic bitch of 1830. Des monographies édifiantes consacrées à Bérulle et l’oratoire, à Saint Jean de La Croix, à Dom Mabillon, à Saint François de Sales, à Thérèse d’Avila, à Marguerite-Marie Alacoque, à Sainte Jeanne de Chantal, à Angélique Arnauld ou à l’abbé de Saint-Cyran ne rougissaient point de partager leur place avec Le Satiricon, Les cent Nouvelles nouvelles, Les Contes de Canterbury, Chevalier Organ de Louis-Antoine Léon de Saint-Just et L’art d’honorer ses montures d’Ahmed Ibn Al-Rumi. Les iris fascinés de la comtesse de Cresseville reconnurent une édition princeps de l’Optatus Gallus, que d’aucuns attribuaient au Cardinal de Richelieu en personne. A coté de cela, il y avait tout Sade, tout Restif, toutes Les Mille et une nuits, Elzévirs en édition bilingue français-arabe. L’ouvrage le plus précieux était un manuel poëtique d’un érotisme extrême, un in-quarto illustré d’estampes épouvantables de stupre et de concupiscence, dû à la plume antique d’Elephantis, l’autre grande poëtesse de la Grèce après Sappho, recueil d’épigrammes retrouvés on ne savait comment, bien qu’on pensât toute l’œuvre perdue. Son cuir en était tout vieux, tout tanné, comme tavelé de jaunissures de pus, blet et craquelé bien qu’étrangement duveteux çà et là. Elémir en révéla la nature à Cléore :
« Ma chère mie, le volume que vous admirez là a été relié dans des peaux de foeti humains avortés de quatre mois. Leur duvet utérin ou lanugo est encore visible. Je vous invite à caresser ce cuir d’avortons ; six ont été nécessaires pour obtenir ce résultat. C’est très doux au toucher. »
Ne comprenant pas pourquoi le marquis, peut-être par forfanterie latine, disait foeti au lieu de fœtus, elle s’exécuta. Elémir n’avait point menti : cette peau morte ainsi attouchée la combla d’aise.
Le moko, ou plutôt, la momie maorie, vint ensuite, horrifique. Cléore n’était point pusillanime mais là, c’en fut trop. Elle cria face à cette vision de la Mort. Une envolée belle y répondit, comme à un coup de feu. Il était inévitable qu’à cette stridulation de biche effarouchée, les oiseaux paniquassent et tentassent de s’échapper, mais ce fut peine perdue, leur volière étant close. Elémir en émit un rire méphistophélique.
« Ma dépouille de guerrier Maori tatoué impressionne toujours les non-prévenus. Cette pièce n’est point courante, il est vrai. Aucune des collections d’ethnographie d’Europe ou d’Amérique n’en répertorie de semblable, se contentant des seules têtes… »
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Il s’attarda à l’horreur morbide exposée dans sa cloche de verre. Son épiderme d’homme illustré se constellait de figures énigmatiques, d’a-formes indéchiffrables, sans qu’aucun pore ne restât immaculé, sans sens aucun pour ceux qui n’étaient point à leur parfum sauvage. Cet homme-squelette grimaçant, sec comme un vieux bois, eût fait jalouser et saliver tous les mathurins des sept mers. Elémir avoua qu’il lui arrivait de soulever la cloche, prêt à s’adonner à un rituel macabre de long toucher sensuel des signes et langages racornis. Selon le marquis, cette atrocité défunte et décorée à l’excès, parée pour la célébration d’un culte indigène conçu par une pensée en enfance, était une œuvre d’art primitive.
La suite de la bibliothèque comprenait un coin salon de thé, fumoir et bar tout à la fois, avec piano en prime, meublé de moelleux fauteuils crapauds capitonnés de pourpre avec reps, chintz, cannetilles et napperons de dentelles de Calais. Des toiles de Jouy et des paravents nippons dépliés ajoutaient au décorum précieux. Le bar lui-même s’agrémentait de force bibelots dans le style Liberty, bibelots qui jouaient la carte anglo-indienne. Deux cloisons tendues de cretonne ponceau servaient à accrocher de nouvelles salauderies artistiques qui n’eussent point dépareillé dans un lupanar pompéien. Une table basse, ronde, en acajou vernissé, était prête à recevoir le service à thé car les sets délicats, aux armes des Bonnemaison, aux broderies arachnéennes, y étaient jà posés. Cléore commençait à languir. Elle piaffait d’impatience, tant Elémir, tout occupé à l’exposition de ses goûts peccants, paraissait en avoir oublié jusqu’à la raison de la présence de son amie ici. Elle fit mine de rougir devant les compositions particulières qu’accueillaient les cloisons cretonnées.
Non que ses yeux se fissent prudes. Non que le remords la touchât justement telle la grâce ; mais cet antre de libertin, de roué, commençait à lasser son équanimité, sa douceur rousse. Elle fit semblant, hypocrite, de se voiler la face. Ses yeux, malgré elle, ne pouvaient se défaire du spectacle de cette aquarelle de Forain où, toutes jupes relevées, une cocotte peroxydée et roucoulante, au visage enfariné et surchargé de mouches de galante, chevauchait avec extase le gisant d’airain d’un politicien célèbre. Cléore savait que de telles scènes d’onanisme n’étaient point rare au Père-Lachaise ; ce monument funéraire était réputé pour sa virilité[1].
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A force de frottements obscènes de femmes en manque de la chose, qui d’ailleurs appartenaient à toutes les classes sociales, la zone incriminée de la statue avait fini par se décolorer, par s’oxyder, par se vert-de-griser avant l’heure, toute imprégnée qu’elle était des sécrétions impudiques de ces Messaline, Isabeau, Salomé et Dame Putiphar du XIXe siècle. La rumeur courait selon laquelle des gitons, des éphèbes, des sigisbées invertis et autres mirliflores étaient aussi de l’expérience… Monsieur le préfet de police avait dû prendre des mesures radicales et clôturer le monument de bronze ; mais, comme métamorphosées en ces fameux passé-singe et autres monte-en-l’air de la pègre apache, ces dames en œstrus passaient outre au risque de la perforation, de l’empalement, escaladaient le tout comme on le fait d’un simple escabeau et peuplaient les nuits du cimetière de leurs cris de volupté féline.
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Cette image de la luxure se tenait front à front, face à face avec une autre, une huile exécutée par un peintre breton. Le paganisme celtique et les rites de fécondité propitiatoires constituaient la dominante du sujet. Le peintre avait représenté une jeune Bigouden en rut, même pas vingt ans peut-être, d’une nudité intégrale à l’exception de sa coiffe d’Armorique, à la toison de blonde, en train de se frotter contre une de ces pierres érigées, de ces roches aux fées que l’on nomme menhirs. Sans doute suppliait-elle quelque divinité chthonienne de la rendre gravide.
Elémir proposa à Cléore de fumer :
« Cigare ? Cigarette ?
- Un simple londrès me suffira, merci. »
Un domestique nègre, torse-nu et gras, fit son apparition. Il tenait une boîte à cigares en laque de Chine sur le couvercle de laquelle on voyait une bonzesse troussée par un buffle. Le torse épilé de ce Numide mamelu et ventru luisait d’huile. Ses reins étaient ceints d’une peau de panthère comme il est d’usage dans les chefferies coutumières de l’Afrique ancestrale et son crâne rasé coiffé d’une chéchia de feutre écarlate. De grands anneaux de cuivre, dits en esclavage, alourdissaient et allongeaient le lobe de ses oreilles d’ébène. Ses pieds se chaussaient de babouches en peau de chèvre. Il souriait, toutes dents dehors, et ce rictus de béatitude lui conférait une personnalité d’enfant satisfait de lui-même. Elémir choisit deux cigares dont il coupa le bout puis congédia le serviteur au physique de poussah :
« Toi y en a pouvoir disposer. »
L’homme reparti, Cléore prit son londrès qu’Elémir alluma à l’aide d’un briquet à hydrogène d’un nouveau modèle américain, d’un verre argenté et adamantin, au socle de cornouiller vernissé, avant de procéder de même pour le sien. La comtesse en profita pour s’étendre, pour s’anonchalir dans le fauteuil crapaud. Ses yeux mi-clos semblaient refléter une langueur infinie tandis qu’elle tirait de longues bouffées de ce tabac cubain. Le moment s’offrait enfin à elle d’exposer les motifs de sa visite.
« Cher, cher ami…commença-t-elle d’une voix feutrée, étudiée, de lasse Dame du Monde. Vous connaissez ma propension à ne rien entreprendre comme le commun. Si je sollicite votre avis, c’est pour une raison bien simple. Toutes mes autres relations, confites comme vous le savez en cagoterie de mauvais aloi, réprouveraient mes projets et me voueraient aux gémonies. C’est pourquoi je me confie à vous, sans autre exclusive, tant, je le crains, le côté répréhensible de mes actions futures pourrait tomber sous le couperet de la loi… Vous êtes le seul à pouvoir me comprendre. Nous partageons désormais une communauté de pensée… Nous aimons la Décadence et abhorrons tout conformisme.
- La loi ? Quelle loi ? La Sienne ? s’insurgea le marquis en désignant un antique Christ en croix catalan polychrome, un Ecce Homo de douleur, suspendu à un mur tourmenté de stucs grotesques, qui rachetait par son supplice toutes les atrocités exposées en ce lieu. Je suis en ce moment dans une phase d’abjuration, après ma période dévote. Il ne peut rien contre moi ; a fortiori, ce prétendu Rédempteur, si vous êtes mon alliée, ne vous châtiera pas non plus.
- Mais la rédemption, très cher, représente l’inverse de l’expiation ! Jésus nous sauvera, quel que soit le poids de nos fautes…
- Il n’y a ni Enfer, ni Paradis ! Le monde est ce que nous en faisons. Balancez-moi ces résidus béats de catholicisme et agissez sans peur. La mort engendre le néant ; il n’y a rien après elle…
- Marquis, seriez-vous agnostique ?
- J’aime l’islam, les croyances des primitifs et même le jansénisme, lorsque je ressens une envie pressante de changer…Sinon, je ne crois qu’en moi-même, qu’en la Connaissance sacrée que le Serpent de la Gnose nous offre. »
Les lèvres de la belle tremblèrent.
« Marquis, ami, j’ai grand’peur… pourtant, je bois vos paroles…comme la honte.
- La honte bue, la honte bue ! Billevesées ! Sophisme ! Lâcheté de calotin ! »
Rageur, Elémir se leva. S’emportant comme s’il eût dû fustiger son domestique de tantôt, il passa sa colère sur le Christ de bois qu’il décrocha, puis replaça tête en bas, avant de cracher sur cette croix vénérable, commettant là un sacrilège de chevalier du Temple.
« Dépouillez-vous de votre peau scrupuleuse ! hurla-t-il, le regard halluciné. Salomé, dévoile-toi ! Comediante ! Tragediante ! jeta-t-il, tel Pie VII à Napoléon.
- Je...je…puisqu’il le faut. Je me soumets, m’en remets à vous, Elémir. Pardonnez-moi, Seigneur, de grâce, pour mes futurs péchés. J’aime…Je…j’ai découvert que j’aime à me vêtir en fillette…parce que…
- Avouez, Cléore ! Satan, le Prince du Monde vous le rendra !
- …parce que…je crois préférer les petites filles à la compagnie des hommes…Elles…sont jolies, mignonnes…leurs rubans euh…
-Etes-vous une tribade, une disciple de Psappha ?
- Je…joue encore à la poupée et j’aimerais à partager les jeux de toutes ces blondines, vêtue à leur semblance.
- Vous évoquez les fillettes de la bonne société, point les pauvresses de la multitude. Or, elles sont trop chaperonnées, trop dans le carcan… Jamais vous ne pourrez (il buta)…assouvir avec elles vos désirs cachés ! »
Cléore éclata en larmes. Ces épanchements lacrymaux pathétiques illuminèrent ses joues rosées, lui conférèrent l’aspect d’une sainte de pacotille aux yeux exorbités par l’extase mystique.
« Merci, mon Dieu…pleura-t-elle. Je l’ai dit.
- Ce sont les filles du peuple qu’il vous faudra amadouer, rendre comme vous, afin qu’elles consentent à partager vos…plaisirs. Apprenez que vous n’êtes point la seule à dissimuler de telles tendances. Vous devez faire équipe, joindre une communauté de femmes portées sur leur propre sexe…
- Mais, elles sont entre adultes…
- L’amour grec inversé… Laissez-moi achever. Avez-vous entendu parler du club des anandrynes ?
- Il y eut sous la Monarchie des libelles infamants qui accusaient la reine Marie-Antoinette de fomenter avec Yolande de Polignac un complot de tribades, afin qu’elles prissent le pouvoir à la place des hommes. On les nommait les anandrynes, du fait de leurs mœurs inverties. Je connais la question.
- Les anandrynes sont une réalité. Elles existent toujours. Elles bénéficient de financements secrets. Leur but n’est pas que politique. Elles veulent bien sûr promouvoir l’amour entre femmes, mais aussi, accessoirement, entre filles et femmes. Sachant les fillettes de la bonne société inaccessibles, elles ont pour projet d’instituer une sorte de Saint-Cyr, à la semblance de l’institution de Madame de Maintenon, œuvre de charité où l’on éduquerait les petites pauvresses…
-… une œuvre philanthropique ?
- Pas seulement, ma Cléore adorée. Il s’agit de former les cadres de demain…
- Pour une révolution politique à la Lysistrata, ou à l’Olympe de Gouges ?
- Une révolution des moeurs…qui passera par cette institution très spéciale.
- Dites un lupanar pour Dames !
- Ce projet va au-delà. Nous avons tous les deux la fortune et je suis prêt à nous engager tous deux dans la réalisation de ce phalanstère voué au culte de Psappha et Bilitis. »
Cléore réfléchissait aux paroles d’Elémir. Elle tirait des bouffées nerveuses, répétées, presque de convulsionnaire, de son londrès dont la consumation épandait une fumée âcre qui irritait ses bronches délicates. Elle toussotait tandis qu’un solfatare bouillait dans sa mignonne cervelle d’oiselle superficielle. Elle ne pouvait que constater les profondes divergences entre sa volonté d’assouvir un désir égocentrique et jouissif, immodéré, son intempérance, et les desseins d’Elémir, plus porté vers la mise à bas de l’ordre moral judéo-chrétien. Depuis sa rupture avec le Dieu de ses parents, elle se définissait comme amoraliste et matérialiste. Elle se contentait de vivre désormais sans précepte aucun. Elémir, au contraire, affichait des convictions immoralistes, comme s’il eût voulu substituer un système nouveau à celui, qui, selon lui, était devenu haïssable et vermoulu. Cette volonté de proclamer la mort de Dieu, de mettre un terme aux fondements bimillénaires de la Civilisation occidentale devait lui venir d’une certaine philosophie allemande, dont l’influence allait croissant. Cléore n’y comprenait mie à tous ces traités illisibles écrits par des demi-fous. Il y avait d’abord eu ce Schopenhauer qui avait provoqué des ravages chez les bonnes consciences. Désormais, un autre sévissait, un prophète des Temps Nouveaux, de l’immoralité, de l’Homme surpassant l’Homme, dont l’importance, néfaste, allait de l’avant, sans toutefois que ses livres fussent pour le moment accessibles hors la langue de Schiller. On ne pouvait plus lors parler de misanthropie mais, bien pis, d’anthropophobie, vomie à la face de tous les gens ordinaires. Leur exécration ne suffisant plus, leur éradication suivrait… N’y prenant garde, absorbée par ses pensées invasives, la comtesse brûla ses doigts de talc délicats au tronçon de son cigare moribond.
« J’ai grand mal ! » criailla-t-elle en secouant sa main droite.
Elémir broncha à peine, se gaudissant de la douillette poupée érubescente, aussi belle en cet instant de dolor que la Marie-Madeleine de Bellini. Il proposa de terminer cette entrevue fructifère par la boisson d’Albion. Il sonna Shoshiro Senseï, son maître de thé japonais, un vénérable vieillard de quatre-vingt-cinq ans, qui avait servi le shogunat Tokugawa, avant que son office ne fût supprimé par la révolution du mikado Mutsu Ito.
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Prise d’un spasme incoercible, la petite gorge de Cléore déglutit. La pourpre aux joues, les pupilles presque d’une transparence d’eau – du moins pour qui observait son œil gauche turquoise -, elle n’objecta plus rien, se pliant aux quatre volontés de son ami, devenu son maître à penser, son Socrate corrupteur. Elle comprit que les filles de rien lui étaient destinées. Ses rêves de volupté aristocratique s’envolaient.
Le maître de thé fit son entrée à pas menus, comme une vieille geisha engoncée dans son kimono de soie. Il paraissait sorti d’une antique estampe qu’eût possédée un daïmio des temps féodaux d’Oda Nobunaga et d’Hideyoshi. Sa vêture traditionnelle répétait un bien connu motif cher à tous les estampeurs émules d’Hokusai : le mont Fuji. Son visage paraissait impavide, presque mort, tavelé d’un labourage d’ancienneté extrême, comme passé au coutre d’une charrue qui l’eût parcouru en boustrophédon et son regard revêtait un aspect vitreux. L’homme était aveugle-né. Il se déplaçait en tenant une canne noueuse de merisier à la main gauche alors que sa dextre simienne supportait seule le poids d’un service à thé d’un vert céladon lactescent à force de pâleur. Ce service n’était point une réplique vendue à Liberty pour quelques esterlins. Il était authentique, de facture chinoise ; sa fabrication remontait à la dynastie Song du Sud et avait compté Tokugawa Ieyasu parmi ses éminents propriétaires. Originaire d’Honshu, Shoshiro Senseï se vantait lui-même d’appartenir à une dynastie immémoriale de maîtres de thé dont on eût pu suivre la généalogie depuis le VIIIe siècle, du temps où Nara était la capitale du Japon.
Il officia, posément, lentement, procédant selon un rituel réglé à la seconde près, rituel qui mêlait shintoïsme et Tao. Lorsqu’il se retira, la boisson capiteuse – du lapsang souchong d’un arôme embaumant quasi aphrodisiaque – était prête à gorger les gosiers. Elémir, afin d’accentuer l’ambiance, prit un étrange coffret à remontoir qu’il actionna puis ouvrit. D’extraordinaires automates homoncules ravirent le regard de Cléore ; une saynète de théâtre kabuki, jouée, selon un scrupuleux respect de la tradition, par des hommes uniquement, se déroula, avec les voix des personnages en prime. Ils psalmodiaient, hiératiques, leurs lentes incantations aux paroles étirées à l’extrême, plus envoûtantes encore qu’un mantra de lama thibétain. Le luxe du détail avait été poussé par l’artisan nippon anonyme jusqu’à leur conférer des masques de théâtre amovibles, en conformité avec les traditions de l’Archipel du Soleil levant.
« L’objet que vous contemplez, ma mie, m’a été offert l’an dernier par Monsieur Guimet, de Lyon, le bien connu collectionneur d’antiquités asiatiques.
- Nous voici donc repartis dans vos collections, soupira Cléore, tout en buvant une gorgée de son thé.
- Vous n’avez point encore tout vu. Ce panneau d’acajou, sis là-bas, dissimule des trésors cachés et un peu…spéciaux.
- Que peut-il y avoir d’encore plus surprenant que ce que vous me fîtes tantôt admirer ? Je me sens blasée, marrie, et rencontrer vos anandrynes me tarde. » minauda la comtesse.
Le marquis abusait tant de son précieux temps mondain que Cléore en souffrait d’affliction alors que ses doigts douloureux réclamaient qu’on les embaumât presque, qu’on les recouvrît même d’alcali pour que se résorbassent les futures cloques des brûlures. Elle songeait aussi à son linge malpropre de ses sécrétions depuis tantôt deux heures, des doux pantalons qu’il lui faudrait changer, remettre à la lingère ce soir. C’était messeoir par rapport à son rang, que ses jambes et son entrefesson demeurassent aussi longtemps poissards et humides comme un potamot. Une odeur gênante allait s’y mettre. Demain, sa peau intime serait rouge, irritée par les malséants frottements de cette lingerie salopée et gâtée. Madame est toute mouillée incarnait un lieu commun répété comme une formule incantatoire magique par une certaine littérature salace et boulevardière.
Mais Elémir s’exécuta et ouvrit le panneau, dévoilant pis que tout. Une théorie de bocaux d’alcool se dissimulait dans cette boiserie : visages fœtaux découpés d’avortons anencéphales, cyclopes, microcéphales, à trompe, bicéphales… Cette tératologie se complétait d’autres flacons, plus petits, et ces flacons renfermaient de bien peu appétissantes reliques. Le marquis en montra quelques spécimens à Cléore.
« Admirez mes assortiments de toisons de femmes célèbres… O’Murphy alias la Morphise, La Pompadour, la Du Barry, Madame de Châteauroux… Et la plus émouvante : la princesse de Lamballe. Vous n’ignorez rien de son sort, je crois. »
Cléore ne put réfréner un tremblement palpébral convulsif face à ces vénérables restes pileux desséchés desquels on ne pouvait savoir par quel trafic le marquis les avait acquis, sans doute de quelque anatomiste érotomaniaque. Ah, s’il se fût agi de sourcils de saints ! Elle opina, acquiesça d’une voix grêle.
« Les massacres de Septembre…la tête montrée à Marie-Antoinette…
- Si encore ces sauvages s'étaient contentés de la décapiter, en riota le marquis. Ils se sont livrés à un dépeçage en règle, déshonorant le corps de la princesse jusqu’à ses entrailles intimes ! Monsieur Flaubert les eût traités de pignoufs.
- Leur haine de meurt-de-faim, par trop accumulée, les a peut-être poussés au paroxysme. Ils furent comme la marmite qui longtemps a trop bouilli qu’à la fin, elle déborde…
- Ne tentez point d’excuser ces misérables ! l’admonesta Elémir. Madame de Lamballe a payé, comme Coligny ou Concini… Constatez qu’elle fut une vraie blonde… »
Il approcha le flacon du visage de son amie, l’y collant presque à son nez mutin ; ses yeux phosphoraient, comme habités d’une extase obscène.
« Admirez cet entrelacement filandreux, ces fils de blé blond, ce safran d’or… n’oubliez point que ces poils admirables firent office de moustache.
- Ah, Elémir, cessons-là ! bredouilla la comtesse. Vous êtes bien fol, mon ami.
- Moi qui escomptais sur votre ouverture d’esprit ! Tenez, je vous dois un cadeau.
- Pensez-vous que je consentirais à ce que vous m’offrissiez une de vos…hem horreurs ? » rétorqua, ergoteuse, Cléore, qui conservait malgré tout ce peu ragoutant étalage son euphuisme atavique.
Mademoiselle la comtesse se résigna à jouer les escobars jésuites, à accepter en toute hypocrisie un des objets déviants d’Elémir. Le marquis fétichiste ouvrit un cabinet de curiosités marqueté de style Louis XIV, exposant de nouveaux objets. Il y avait là, certes encore, de jolis masques d’Asie, chinois et japonais…les chinoiseries se référant, pour leur part, à un culte ancestral traditionnel, de type animiste, où la géomancie jouait un rôle important. Mais les colifichets impurs, aux troublantes formes érigées, sculptées dans les matériaux nobles et précieux, durs ou tendres, qui se dressaient, ça et là, entre chaque masque marouflé et peint vieux de plus de deux siècles, appartenaient à une catégorie spéciale, que l’on ne nomme pas. Cléore connaissait par ouï-dire ces pratiques dites de plaisir solitaire de la femme.
A côté du visage du célèbre Di Pan, le Grand Géomancien magique du vieux rite Nuo, à la barbiche confucéenne, Elémir prit un de ces godemichés, qui paraissait réduit à un simple fourreau de cuir, étréci, rétracté singulièrement.
« Cléore, je vous fais solennellement don de mon sabre de geisha. »
Ses mains délicates prirent cette chose. Une moiteur épidermique malvenue imprégna les paumes de Cléore, quoi qu’il ne fît point chaud dans cette vaste pièce. La langue d’Elémir s’engagea dans des péroraisons divagantes et érudites. Sa bouche de pécheur salivait de plaisir à l’exposition des buts et usages de l’objet.
« Au sein d’une société d’hommes, de samouraïs, voués au respect du code de l’honneur chevaleresque, du bushido, les femmes ne pouvaient jouer que deux rôles : épouse soumise et mère ou courtisane. Ainsi était le Japon féodal des daïmios. La perte de l’honneur imposait à celui qui avait failli au code de mettre fin à ses jours. En Europe, on dit vulgairement se faire hara-kiri. Mais le terme exact est seppuku. Selon les puristes, le seppuku authentique consiste à un suicide rituel en deux temps, qui nécessite la présence d’un officiant-exécutant en plus de celui qui met fin à ses jours. Celui qui se tue dévoile son ventre, déroule le bandage qui le cache et s’enfonce la lame d’un sabre court dans l’abdomen tandis que l’autre, cette fois avec un sabre long, le décapite. Lorsque toute une maison était entachée de déshonneur, il était d’usage que tous les serviteurs du chevalier nippon partageassent le rituel, ainsi collectif… y compris l’épouse ou la courtisane, si l’impétrant vivait avec une maîtresse…dont il possédait le droit de vie ou de mort.
- Et…ce fourreau ? M’éclairerez-vous l’esprit ?
- Ce sabre de geisha ou seppuku de geisha prodigue mort ou vie, plaisir ou tourments létaux…ou successivement les deux. Permettez, ma mie, que vos jolis yeux se délectent d’une petite démonstration. »
Cléore restitua le fourreau.
« Voyez le bas…Il comporte deux boutons, deux mécanismes d’un ars subtilior nonpareil…
- Je sais les civilisations d’Extrême Orient fort avancées, y compris pour ce qu’il est malséant de nommer…
- L’usage de l’arme est double : arme de plaisir ou de mort… encore faut-il prendre garde à ne point se tromper de bouton. J’appuie sur le premier. »
Du fourreau jaillit, orgueilleux, impudique, un membre de sycomore d’un réalisme agreste et d’une finesse de sculpture insigne.
« Tel est l’usage premier…mais attention, ma Cléore…je presse à présent le second bouton. Prenez garde à ce que vos jolis doigts d’enfant, jà blessés par votre cigare, ne s’écorchent pas. »
On se serait attendu avec logique à ce que la seconde manœuvre entraînât l’épanchement d’une imitation de semence, entreposée dans quelque réservoir interne, pour rendre la pratique déviante encore plus réaliste et crue…mais à défaut de crudité, ce fut la cruauté qui l’emporta. De l’extrémité du phalle de bois, une lame effilée, d’un acier lumineux, presque aussi fine qu’une aiguille, pointa, prodiguant à l’objet une longueur impressionnante.
« On dit que la lame est si longue qu’entrée dans ce que vous savez, elle peut pourfendre tout le corps, l’empaler en son entier, et surgir par le nez, la bouche ou l’orbite de la suicidée…avec les hémorragies spectaculaires que cela implique. On dit aussi que certaines courtisanes tentèrent d’utiliser ce sabre-pal non point pour se faire seppuku, mais pour se délivrer des fruitions non désirés… »
Le vice incarné…ce godemiché représentait le vice incarné. Cléore se jura d’enfermer cet accessoire dans un coffre dont il ne sortirait jamais. Elle en eut une défaillance. La malheureuse enfant se pâma et des sels furent nécessaires. Allongée sur un sofa, son nonchaloir forcé l’empourprant, elle vit Elémir assis à un bureau d’ébène avec une écritoire, occupé à rédiger un billet à l’attention de la vicomtesse de., avec une archaïque plume d’oie. Mademoiselle avait adopté le révolutionnaire stylograph et s’étonnait du conservatisme de son ami.
« J’écris à la vicomtesse de. La semaine prochaine, elle organise un bal costumé en son château de Meudon…un bal qui est en fait une sorte de fête d’Hébé, de ballet de La Merlaison, de mask Stuart ou de bal des ifs de toutes les anandrynes de France et de Navarre. Circonstance propice à votre prise de connaissance du milieu et à l’exposition de tous nos projets. Madame la vicomtesse m’ayant jà invité, je l’informe de mon désir de vous joindre à la compagnie, de votre volonté d’adhérer à notre cause… Elle répondra positivement à cette requête, je vous le garantis.
- Une fête costumée euh…féministe ? Mais quelle vêture arborerai-je pour cette occasion ?
- Venez adonisée en petite fille modèle, puisque cela vous sied. Votre corps de sylphide mérite les éloges.
- Soit, mais…vous serez un homme dans une assemblée de femmes…
- Je suis hermaphrodite. » répliqua laconiquement Elémir presque avec véhémence et courroux.
Cléore ne comprit point le sens exact du mot. Elémir s’exprimait-il littéralement – s’agissait-il d’un de ces monstres de foire ou de Satiricon comme les femmes à barbe ? Un chevalier d’Eon ? – ou la signification en était-elle figurée, symbolique ? Dans la seconde acception, cela signifiait qu’Elémir pût s’enamourer aussi bien d’hommes que de femmes.
«Il serait donc bi…bi quelque chose », bredouilla Cléore in-petto.
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[1] Curieusement, ou par prescience, Aurore-Marie de Saint-Aubain semble anticiper d’un an la réalisation par Dalou du monument funéraire du journaliste Victor Noir, assassiné par Pierre Bonaparte en 1870. Il faut dire qu’à la date de la rédaction du « Trottin », le projet était déjà connu. Un modèle en plâtre avait même été exposé au salon de la Société nationale des Beaux-Arts. Le gisant fut inauguré au Père-Lachaise le 15 juillet 1891.